La conférence « Britishness, Irishness and Religious Identities in Britain and its Dominions, from 1880s to the 1920s » donnée le 5 octobre 2023 par Géraldine Vaughan, professeure à l’université de Lille s’inscrit dans la thématique de l’aire Irlande du laboratoire CECILLE.
Les travaux de Géraldine Vaughan (Université de Lille) se concentrent sur la question de la sécularisation de l’Irlande ainsi que de l’Écosse, et également sur la question de la diaspora irlandaise. Dans son ouvrage Anti-Catholicism and British Identities in Britain, Canada and Australia, 1820s-1920s (Palgrave Macmillan, 2022). Géraldine Vaughan observe l’évolution du sentiment anticatholique en Grande Bretagne.
Lors de son intervention, Geraldine Vaughan évoque la question de la diaspora irlandaise, en effet, en 1881 la démographie du pays était de 5 400 000 habitants tandis que la diaspora comptait 3 680 000 membres. Cette diaspora s’est développée dans le contexte historique de la Grande Famine survenue dans les années 1840 et n’a cessé de grandir au fil des années. Elle s’est étendue aux quatre coins du monde, et particulièrement dans des territoires britanniques, et était perçue comme une menace [HL2] pour ces mêmes territoires majoritairement protestants. En effet, la question de l’identité irlandaise, historiquement liée au catholicisme, allait à l’encontre des idéologies britannique, fondés sur la notion d’une identité britannique, dit Britishness.
De nombreuses communautés religieuses en Angleterre, Australie et en Écosse ont ainsi perpétué une stigmatisation des systèmes religieux en Irlande. Géraldine Vaughan mentionne notamment les « Militant Evangelicals ». L’Imperial Protestant Federation (IPF) organisée par l’activiste religieux Walter Walsh, a fédéré de nombreuses associations en Grande-Bretagne ainsi qu’en Irlande et dans le monde entier comme la Protestant Reformation Society (1827), The Protestant Alliance (1851), The Australian Protestant Defense Association (1901). En 1806, le nombre de membres de l’IPF a accru radicalement, comptant 1 600 000 membres et pas moins de soixante sociétés affiliées. Les militants membres de ces associations avaient une définition de l’identité britannique modulée selon leurs propres idéaux. Il était, pour eux, nécessaire d’être protestant afin de prétendre à la notion de Britishness, cette idée existant non seulement en Grande-Bretagne, en Irlande, mais également dans le reste de l’empire.
Le deuxième point soulevé était que les Irlandais étaient considérés comme « autres » et ne pouvaient par conséquent prétendre à une identité britannique.
Geraldine Vaughan s’est notamment intéressée au sentiment anti-irlandais perpétué durant le long dix-neuvième siècle en Grande-Bretagne ainsi qu’en Australie. Les Irlandais étaient particulièrement caricaturés dans les médias britanniques, renforçant et partageant donc un sentiment anti-irlandais. Les Irlandais étaient sujets à de nombreux préjudices sur les plans sociaux, politiques et religieux, tous établis et partagés par la population britannique. La notion de classe a été abordée ; la classe ouvrière irlandaise était majoritairement stigmatisée par la classe moyenne britannique. Cette même classe ouvrière irlandaise était intrinsèquement associée à un sentiment nationaliste dans l’opinion britannique.
Au même titre, la League of Loyalty to the Empire and for the Protection of Civil and Religious Rights en Australie a contribué à la stigmatisation de l’Église Catholique, jugeant que le vote catholique était une menace, de par son expansion.
De même, la Première Guerre mondiale a été source de paradoxe. Les loyalistes considéraient que le Soulèvement de 1916 était une trahison de la part des Irlandais. Cependant, de nombreux irlandais ont rejoint l’armée britannique pendant la guerre, pas moins de 200 000 soldats ont servi les forces britanniques. L’Australie a, par ailleurs, été un acteur majeur de la stigmatisation des Irlandais tout au long de la campagne militaire, relatant, encore une fois, l’image des Irlandais comme « autres ». L’association de la foi catholique était incompatible avec l’identité britannique, qui elle, était intrinsèquement liée au protestantisme.
Les années 20 étaient d’autant plus importantes concernant la stigmatisation de l’Église Catholique; les tensions entre les Catholiques et les Protestants étaient à son comble, particulièrement en Ecosse et en Australie. En effet, les églises catholiques dans ces deux pays étaient très influencées par l’Eglise catholique irlandaise. Les prêtres catholiques étaient majoritairement irlandais et organisaient donc des cérémonies qui étaient considérées comme dangereuses ; les protestants frayaient que ces mêmes cérémonies proliféreraient au sein du pays, allant à l’encontre de la foi majoritaire protestante.
L’église nationale d’Écosse a publié en 1923 une brochure intitulée “The Menace of the Irish Race to Our Scottish Nationality”, dans laquelle il était soutenu que l’influence irlandaise menaçait la société écossaise . En 2002, le gouvernement écossais a présenté ses excuses concernant le pamphlet, déplorant un comportement ‘sectaire’. Les études des préjudices anti-Irlandais ont montré que ce phénomène était courant à travers toute l’Europe au dix-neuvième siècle ; d’autres minorités ont également ont subis un préjudice équivalent. L’identité nationale en Grande-Bretagne et en Irlande était inséparable de l’appartenance religieuse, ce qui a, par conséquent, accentué le sentiment d’intolérance religieuse.
Un enregistrement de la conférence est également disponible d’accès ci-dessous:
OpenEdition suggests that you cite this post as follows:
madelinemouton (March 7, 2024). 05/10/2023: Britishness, Irishness and Religious Identities in Britain and its Dominions, from the 1880s to the 1920s. – Geraldine Vaughan, Université de Lille. AIRE IRLANDE. Retrieved September 9, 2024 from https://doi.org/10.58079/vzbx